Réflexion sur les choses perdues

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Il y a longtemps, j’avais écrit à propos des premiers gestes au jardin, ceux qui évoquent le printemps.

J’avais décrit la douceur du soleil à travers les vitres de ma petite serre, la satisfaction de récupérer les graines à semer, la confiance dans le futur liée au réconfort du passé.

Mais, parfois, les rites s’estompent. Le temps qui presse, les événements inattendus, le climat hostile avaient, dernièrement, mis fin à ce moment si paisible.

Suite à une réorganisation nécessaire à un meilleur fonctionnement de l’activité de vinification, la décision est prise: dire adieu à la petite serre, et la reconvertir en abri de jardin, pour libérer de l’espace vital pour le cuvage.

Alors, la crainte de perdre une partie importante de poésie, et du sens, m’a saisie. Le doute que les choses, en n’étant plus celles que je connaissais, auraient pu empirer, m’a submergé.

Réfléchir, prendre son temps, faire de la place, accueillir le nouveau… pas facile! Trouver une solution qui soit en même temps pratique, esthétique et économique…

Et voilà! Les réponses se présentent si l’esprit est capable d’attendre un signe.

Les vitres retirées et, en guise de murs, des portes anciennes récupérées chez Emmaus, quelques unes encore avec les notes des poseurs de l’époque: le passé qui revient, pour embellir le présent.

J’ai repeint en clair celles qui étaient trop foncées à mes yeux, nettoyé et remis en état les vieilles étagères (qui avaient commencé leur vie comme armoires à pulls dans ma première maison d’adulte), J’ai récupéré des petites bibliothèques de famille en fer forgé, trouvé les bons conteneurs pour les différents objets. J’ai replacé, trié, jeté, remis en valeur.

Mon cabanon est beau.

L’extérieur est encore à peindre, mais, à l’intérieur, chaque chose a trouvé sa place, même les tuteurs pour mes tomates.

Les pots sont rangés sous la petite table de rempotage, prêts à être remplis avec les jeunes pousses de printemps. Les sécateurs et les gouges défilent, accrochés à les jolies parois en bois blanchi.

Des tiges de lavande séchée embaument l’air, les mini ardoises sont stockées dans un pot en zinc, les gants de jardin, le rafia et la cordelette ne sont pas loin…

Bien entendu, Il y a de la laideur aussi, comme dans toutes choses: des jerricanes en plastiques pour les traitements, les tuyaux aux couleurs trop vives, les pulvérisateurs pour les produits: mais tout est accueilli, parce que tout joue un rôle plus ou moins important dans l’économie du jardin.

Le soleil et l’ombre, comme toujours.

Et alors, pourquoi regretter ce qu’on a perdu?

La beauté est en nous, donc, elle est partout.

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